En effet rien de ce qui est de droit humain ne saurait déroger à ce qui
est de droit naturel ou de droit divin. Or selon l’ordre naturel institué par
la divine providence, les réalités inférieures sont subordonnées à l’homme,
afin qu’il les utilise pour subvenir à ses besoins. Il en résulte que le
partage des biens et leur appropriation selon le droit humain ne supprime pas
la nécessité pour les hommes d’user de ces biens en vue des besoins de tous.
Dès lors, les biens que certains possèdent en surabondance sont destinés, par
le droit naturel, à secourir les pauvres. C’est pourquoi Saint Ambroise
Ă©crit : « Le pain que tu gardes appartient Ă ceux qui ont faim, les vĂŞtements que tu caches appartiennent Ă
ceux qui sont nus et l’argent que tu enfouis est le rachat et la délivrance des
malheureux. » Et même, en cas de nécessité évidente et urgente, où il faut
manifestement prendre ce qui est sous la main pour subvenir Ă un besoin vital,
par exemple quand on se trouve en danger et qu’on ne peut pas faire autrement,
il est légitime d’utiliser le bien d’autrui pour subvenir à ses propres
besoins ; on peut le prendre, ouvertement ou en cachette, sans pour autant
commettre réellement un vol ou un larcin.
Saint
Thomas d’Aquin.