De petits pas en petits pas…
CPE, je suis très
attentive à la campagne du respect dont j’apprends quelquefois l’existence par
les médias. Je trouve formatrice la démarche pour les élèves qui ont élaboré
les « spots » à la télévision. Mais je reste extrêmement dubitative
quand je constate dans cette campagne que seuls les collégiens et les
lycéens sont montrés comme susceptibles de manquer de respect. Et l’institution
? Et les adultes ? J’ai été confronté à un cas d’école dans mon collège, le
surlendemain d’une conférence de Bernard Defrance ; appelée au secours dans une
classe par une professeure dont un élève avait dit : « Elle est
folle, la meuf ! » J’appris que ce professeur avait divulgué les moyennes
de ces élèves haut et fort dans la classe, que cet enfant peu
« respectueux » était le dernier et que sa moyenne était inscrite au
tableau au vu et au su de tout le monde, au pilori en quelque sorte. J’ai pu
établir avec cet enfant, dont je sais qu’il est battu, des relations de
confiance. C’est ainsi que, à ma demande respectueuse qui lui expliquait devant
toute la classe que personne ne pouvait douter sciemment de sa bonne santé
mentale, il s’excusa devant la classe : l’offense avait été publique et
donc les excuses devaient l’être aussi. Je suis encore touchée de sa grande
intelligence émotionnelle et je l’ai remercié de sa confiance.
Il m’a fallu ensuite
travailler auprès de la professeure que j’ai remerciée dans mon bureau de
m’avoir appelée dans sa détresse de se croire folle. Je lui ai expliqué la règle
de confidentialité des documents administratifs et lui ai suggéré de mettre par
écrit les moyennes sur un papier bristol au nom de chaque élève avec un mot
approprié et peut-être des mots d’encouragement. J’avais pris soin de lui dire
que j’avais reçu un élève, la veille, qui m’avait dit combien il apprenait bien
avec elle. Le lendemain, cette professeure, en m’assurant de sa bonne foi, m’a
dit qu’elle avait réfléchi, que j’avais raison et qu’elle s’y prendrait
autrement la prochaine fois pour désamorcer la violence induite par l’approche
des conseils de classe, surtout en ZEP.
Ce petit saut de puce
constitue pour moi une avancée dans le respect mutuel. De même, quoi qu’il
arrive, je refuse de quitter un groupe d’élèves avec qui je travaille pour
quelque motif que ce soit en leur expliquant que je me suis engagé à rester
avec eux, rien que pour eux, et que même si le président de la République, le
pape ou le recteur de la mosquée de Paris me sollicitaient, je refuserais
parce-que je me suis engagée à ce moment présent à rester avec eux. J'ai
beaucoup de difficultés avec l'équipe, mais je tiens. Pour moi, c'est cela, le
respect.
Catherine Leboullenger,
CPE.